Autoactu.com : L’année 2013 doit marquer le renouveau de Mazda en France, avec deux nouveautés majeures, CX-5 et Mazda 6. Mais dans quel état est aujourd’hui votre réseau de
distribution avec plusieurs années de vache maigre ?
Philippe Geffroy : En quelques années, les ventes de la marque sont tombées de 15 000 unités à 5 300 l’année dernière. Cette baisse de volume, liée à un manque de nouveautés
produits et à la crise, s’est traduite par un désengagement de nombreux concessionnaires, qui par ailleurs étaient sollicités par d’autres marques plus porteuses. Ainsi, en 18 mois une
vingtaine de sites ont été fermés et le réseau ne compte plus aujourd’hui que 118 points de vente.
Nous avons aussi incité nos concessionnaires multisites à transformer leurs points de vente annexes en réparateur agréé pour réduire leurs coûts. Certains répartissent aussi leur coût
de structure sur plusieurs marques. C’est le cas de Georges Legrand qui envisage d’intégrer Suzuki au site exclusif qu’il nous a consacré sur Rennes. L’arrivée de deux
nouveautés cette année nous permet de commencer à redéployer la marque, avec une dizaine de nominations sur des territoires abandonnés, Lyon sud, Lille, Tours par exemple, et
prochainement La Rochelle, avec des structures mieux adaptées au volume actuel. Nous avons encore de nombreux open-points, notamment dans l’Ouest parisien.
AA : Quelle a été la rentabilité de votre réseau en 2012 et à quel niveau se situe le point mort d’une concession ?
PG : En 2012, le réseau a perdu de l’argent, -0,5% en moyenne, avec des concessionnaires exclusifs à +0,3%, grâce aux performances exceptionnelles de certains d’entre eux, à
Metz ou à Gex, par exemple.
Globalement, nous estimons qu’il faudrait des volumes minimum de 100 VN par point de vente exclusif et un peu moins pour les sites multimarques. Toutefois, cette année, avec un mix qui
sera composé à plus de 50% par CX-5 et Mazda 6, le prix moyen et les marges vont nettement s’améliorer et les volumes n’auront pas forcément besoin d’être élevé. Toutefois, chaque cas
est unique. Notre excellent concessionnaire de Metz, Philippe Blanquier, premier de France avec un volume de 200 VN, a souhaité ouvrir un autre site exclusif à
Thionville, chose que nous aurions déconseillé à tout autre concessionnaire.
AA : Quelles sont vos ambitions commerciales pour cette année ?
PG : Nous tablons sur un volume de 7 000 immatriculations, dont 3 000 CX-5 et 1 800 Mazda 6. Cela peut paraître élevé dans le contexte actuel mais il faut savoir que nous
avions un portefeuille de commandes à fin 2012 de 1 000 CX-5 que nous livrerons cette année. A fin février, nous sommes la marque qui progresse le plus sur le marché et à mi-mars nous
sommes à +30% d’immatriculations et +22% de prises de commandes.
Nous avons été confrontés à de gros problèmes de délais sur CX-5, avec 9 mois d’attente en novembre qui sont ramenés aujourd’hui à 4 mois. Alors que la demande au Japon porte
habituellement sur les motorisations essence ou hybride, notre moteur Diesel, particulièrement performant, y remporte un franc succès, ce qui a créé ces problèmes de disponibilités.
Aujourd’hui, les capacités de production mondiales ont été augmentées à 240 000 unités, contre 160 000 auparavant.
AA : Disposez-vous de moyens commerciaux suffisants pour redonner de la notoriété à la marque en France ?
PG : Il n’y a pas de raison que nous fassions en France une part de marché de 0,3%, soit des volumes équivalents à ce que la marque vend en Autriche ou en Suisse. Notre
objectif est de revenir à une part de marché de 1% d’ici 2016. Après un cercle vicieux "manque de produits-réduction de la taille du réseau-baisse de la notoriété", nous devons repartir
sur une dynamique vertueuse mais pour cela nous devons en effet convaincre la marque de surpondérer nos budgets de communication pour obtenir les résultats que mérite notre marché, le
troisième en Europe. C’est un sujet qui sera finalisé après la clôture des comptes de la marque (fin mars).
Pour CX-5, produit de volume sur un segment en forme, nous avons communiqué en télévision, mais ce ne sera pas le cas pour Mazda 6 sur un segment trop limité. Nous communiquerons en
revanche davantage sur Internet et en direct sur le terrain auprès des entreprises, clientèle qui doit représenter 30 à 40% de ses volumes de vente. Nous avons notamment ciblé une
trentaine de concessionnaires capables de proposer un service valorisant et distinctif aux entreprises clientes de Mazda 6.
AA : Le constructeur Mazda réalise-t-il des volumes de vente suffisant pour rentabiliser les investissements colossaux nécessaires pour développer de nouvelles plateformes et de
nouveaux moteurs performants ?
PG : Notre stratégie de retour à la rentabilité passe par une réduction des coûts, en mutualisant la plateforme et les moteurs pour CX-5 et Mazda 6, des voitures positionnées
pour se vendre sur tous les marchés mondiaux. Ce sont deux modèles qui doivent générer de la rentabilité et de la notoriété, avant de renouveler nos Mazda 2 et 3 et d’étoffer notre
gamme, avec 6 ou 7 nouveaux modèles d’ici à 2016, comme, par exemple, un CX-3.
Nous mutualisons aussi nos coûts à travers des partenariats ponctuels comme le partage de la future plateforme de Mazda 2 avec une citadine Toyota, deux modèles qui seront fabriqués au
Mexique, ou la production commune au Japon de la future MX-5 et du Spider Alfa Romeo, même si les moteurs seront différents. Nous produisons 1,3 million de véhicules, ce qui est encore
suffisant pour vivre seul.
Autoactu.com le 21/3/2013